Planche sous le bras, une poignée de skateurs entrent dans le palais des Congrès Odysséa de Saint-Jean-de-Monts, en Vendée, où se tient jusqu’au 29 août l’exposition « Art et Sport, la Rencontre ». Devant leurs yeux se dressent des planches uniques en leur genre, décorées selon les codes du street-art. Un univers familier aux jeunes visiteurs, un peu moins aux parents ou grands-parents qui les accompagnent. « Le street-art et les graffitis se sont développés dans les années 1980. Ses représentants ont très vite investi des supports comme les skateboards en les décontextualisant de leur fonction première pour les utiliser comme des toiles« , rappelle Adeline de Monpezat, galeriste de L’Espace D’Art Le Comœdia, à Brest, où exposent neuf des « skate artistes » accueillis cet été à Saint-Jean-de-Monts. « Les skates ont toujours été un support artistique pour nous. La forme de l’objet s’y prête, et puis les planches étaient souvent nues avant les années 1980« , confirme l’un d’eux, Cédric Lascours dit Reso.
Si le graffeur toulousain n’en est pas à son coup d’essai dans le skate art, le brestois Pakone, 47 ans, de son vrai nom Yann Métiver, s’est frotté pour la première fois à l’exercice pour les besoins de l’expo. Il a aimé l’expérience malgré ses contraintes. « Il faut s’imprégner des atouts que le support présente. Les courbes changent de celles d’un mur, la taille aussi. Le bois se rapproche de la nature, des jouets d’enfance. Il faut être plus minutieux que pour du street-art classique. On fait, en quelque sorte, du tatouage d’objet« , précise celui qui a réalisé son travail à l’aérosol et à l’acrylique. Du tatouage qui fait ici la part belle à une grande diversité d’approches. Le style figuratif du peintre franco-congolais Kouka Ntadi voisine avec l’op art (ou art optique) du plasticien toulousain Nicolas Delpech, l’humour caustique du pochoiriste Numa Monsi contraste avec la poésie teintée de surréalisme des planches taillées de Lady K. La salle dédiée au skate art est une exposition en soi. Elle est aussi le miroir de l’infini possible qu’offre l’art urbain. Pour les besoins de l’événement, les artistes ont d’ailleurs pu laisser galoper leur imagination, le lien avec le monde du sport étant concrétisé par le support lui-même.
« Les skates ont toujours été un support artistique. Leur forme s’y prête » Le graffeur Cédric Lascours, dit Reso
A passer d’une œuvre à l’autre, l’évidence du lien entre le skate et le street-art frappe le visiteur. « Les deux disciplines ont le même terrain de jeu, confie Pakone. La rue, évidemment, mais aussi les skateparks qui sont des endroits prisés des graffeurs. On essaie de faire vivre la rue, on la perçoit différemment des autres. On peut s’exprimer n’importe où pour essayer de continuellement réinventer nos arts. » Reso, skateur de longue date, voit un autre point commun : « un côté interdit dans les deux disciplines. Les deux se pratiquent sans statut particulier, sans nécessité d’adhérer à une structure. On envoie les skateurs et les graffeurs dans les mêmes endroits d’ailleurs, comme si cela gênait certains que l’on puisse dégrader l’espace public. » Deux mondes synonymes de liberté réunis pour tenter d’ouvrir l’art au plus grand nombre, tel est, aussi, l’objet de l’expo « Art et Sport, la Rencontre ». « Nous avions la volonté de démocratiser l’art auprès des plus jeunes, notamment grâce à ces œuvres abordables« , confirme Adeline de Monpezat. Car oui, les planches de skate exposées à Saint-Jean-de-Monts sont à vendre. Comptez entre 600 et 1 400 € la pièce. Pas question, cependant, de fixer sur elles des roulettes en vue de réaliser des slide sur les rampes du skatepark le plus proche. « Ah non, rigole-t-elle. Ce sont tout de même des œuvres d’art ! »
Exposition « Art et Sport, la Rencontre », jusqu’au 29 août au palais des Congrès Odysséa, à Saint-Jean-de-Monts (Vendée).
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