Tout savoir sur la SAPE et la Sapologie

Tout savoir sur la SAPE et la Sapologie

HISTOIRE DE LA SAPE

 

La Société des Ambianceurs et des Personnes Élégantes, plus connue sous son acronyme de SAPE, se décrit comme un mouvement esthétique vestimentaire, souvent comparé au dandysme. En réalité, il est bien plus qu’une affaire d’habillement. La SAPE trouve ses origines dans la contestation que l’on date à la fin du XIXe siècle au Congo, lorsque les esclaves décident de s’habiller de façon luxueuse comme les colons, ou à la création du mouvement avec l’action d’André Matsua qui refuse d’abandonner son uniforme après la guerre du Rif, en protestation au sort réservé aux tirailleurs démobilisés.

Le mot « sape » recouvre alors la même signification que dans « un travail de sape » soit : l’action secrète et incessante pour détruire la réputation, le travail de quelqu’un ou quelque chose.

Cette insoumission répond à l’oppression de la société occidentale, qui souhaite que les congolais se fassent « discrets » et invisibles.

Pendant les indépendances (dans le courant des années 1950-1960), le mouvement connait une grande ascension. Les Sapeurs se font appeler les « wengueurs » (qui signifie « bien habillés » en congolais) et vont ainsi transmettre leurs valeurs. Le mouvement se développe en Belgique, en France et plus précisément à Paris – capitale de la mode – période durant laquelle plusieurs immigrés congolais en devenant sapeurs rejettent le rôle social que les pays d’accueil leur assignent. Par leur élégance, les couleurs voyantes, les dépenses somptuaires de leurs costumes, les sapeurs s’affichent dans l’espace public et refusent d’effectuer le travail manuel sous qualifié et sous payé qu’on leur impose. Ils fréquentent les clubs (le Rex), les bars et les lieux où ils peuvent laisser libre court à leurs mises en scène. Des créateurs de mode français de renommée mondiale vont même s’y rendre pour prendre part au phénomène (à l’instar de Louboutin ou Jean-Paul Gauthier).

Si le lieu de naissance de la sape suscite toujours des débats entre Brazaville et Kinshasa, c’est bien un phénomène urbain multifacette : culturel, politique et social. Cette contre-culture devenue extrêmement populaire en Europe et aux deux Congo peine à être reconnue et soutenue par les autorités congolaises. D’abord, la sape transcende la détermination sociale en bousculant les représentations, puis elle est synonyme de liberté.

Depuis la zaïrisation à partir des années 1970, les sapeurs représentent plus ou moins une menace du pouvoir en place, par leur volonté de dénoncer la société endoctrinée. Les sapeurs avec leurs vêtements de marques étrangères refusaient de se conformer à la doctrine de « l’abacost » (« à bas le costume ») imposé par Mobutu jusqu’en 1991.

ET LES SAPEUSES ?

 

Dans ce milieu historiquement masculin, les sapeuses sont peu nombreuses et revendiquent l’égalité des sexes. Elles s’affirment de plus en plus et tentent de faire bouger les lignes malgré les difficultés. Reprenant tous les attributs et les attitudes de la SAPE, habillées en homme ou pas, ces ambianceuses défient les codes de la société. Finalement, c’est le style qui leur sert à définir leur identité et comme l’écrit Aphélandra Siassa : « c’est peut-être ce qu’il faut garder à l’esprit de ce courant. La S.A.P.E, plus qu’un mouvement esthétique, est une manière pour cette communauté de mettre en avant son identité, de dépasser les disparités sociales, culturelles, économiques et même de genre. De braver le regard de l’autre tout en se réinventant.»

Interviews exclusives

 

Bienvenue chez nos artistes sapeurs !

Le saviez-vous ? Chéri CHERIN et Shula MOSENGO sont non seulement des artistes contemporains mondialement connus pour appartenir au mouvement historique de la peinture populaire mais aussi des sapeurs de la première heure.

Le Comœdia est allé à leur rencontre :

Que représente la sape pour vous ?

La sape c’est de l’art. C’est l’art de bien s’habiller. C’est une tradition.

Comment pouvez vous nous définir la sape?

La sape comme j’avais dit au début c’est l’art de bien s’habiller. Cela ne se limite pas à l’habillement mais aussi il faut bien se coiffer, bien sentir. La sape c’est aussi la combinaison de la couleur, c’est de l’élégance.

Étant artiste peintre, quelle vision avez-vous de la sape ?

Ma vision en tant qu’artiste sur la sape est simple. La venue de la sape à Kinshasa vers la fin des années 70 et les débuts des années 80 avait bousculé la société et cela a vraiment contribué à notre culture. La sape c’est de la culture africaine, quand on s’est bien habillé, bien
coiffé, bien parfumé, on doit aussi avoir une bonne démarche. Savoir bien bouger son corps. Contrairement au mannequinat qui exige une certaine démarche à respecter.

Je vous informe en passant que je suis le premier artiste peintre à peindre sur la sape.

Vous étiez sapeur dans votre jeunesse ?

J’étais, je suis et je resterai sapeur jusqu’à la fin de ma vie.

Merci beaucoup maître de nous avoir accordé ce temps.

C’est à moi de vous remercier pour cet honneur.

Le Comœdia remercie chaleureusement son envoyé spécial Triphe Jésus de la Sape -artiste et sapeur- pour avoir interviewé Chéri Chérin.

SHULA MOSENGO

 

Que signifie la sape pour vous ?

Pour moi, la Sape met l’homme en valeur avec ses aspects exhibitionnistes qui donne la bonne humeur, la gaieté, joie et sourire, bref la bonne ambiance. Ça fait partie de notre vie, une identité, un mode de vie qui est ancrée dans notre société. L’habillement définit aussi votre personnalité. Quelques temps juste après notre naissance, on nous habille et ça nous accompagne tout au long de notre vie, dans toutes les circonstances, dans les mariages, les fêtes, au bureau, pendant le deuil jusqu’à la tombe.

En savoir plus sur Shula Mosengo 

 

LE CODE DE LA SAPE

 

 

1- Porter des marques de luxe

2- Arborer 3 couleurs maximum

3 – Être élégant tout le temps

4- Avoir confiance en soi

5- Être incollable sur la mode

6- La sape est un art et nécessite des heures
de travail

7- La sape est un mode de vie et de pensée

8- Apporter la joie

9- Être ouvert sur le monde

10- Embellir la vie

POUR ALLER PLUS LOIN

 

Visionnez la playlist YouTube du Comœdia : Le comoedia aime la SAPE

 

Sur le web et réseaux sociaux :

Les griffes de la danse, Manuel charpy, (ici)

La S.A.P.E : des joyeux ambianceurs au combat politique, (ici)

L’officiel de la SAPE

Les sapeurs de Congo Brazaville, ces néo dandys, Samba sisters touch (ici)

 

Film :

Sapolémique, documentaire d’Higgin’s Mangata Mausangu

Le sapeur, documentaire de David-Pierre Fila

 

Livres :

S.A.P.E., Héctor Mediavilla

Dictionnaire de la sape, Makouezi Elvis Gueri

Au coeur de la sape: moeurs et aventures des Congolais à Paris, Justin Gandoulou

Dandies à Bacongo, Justin Gandoulou

Triphe Jésus de la Sape en compagnie d’un jeune sapeur

Newsletter